Allô Docteur?

Publié le 27/05/2014 (mise à jour le 01/07/2018 à 16h56)

Vignette

Le médecin est représenté au-dessus de tous les contextes situationnels.

Sa place est difficile car son cabinet est à l’extérieur de l’institution ou du domicile. Il répond comme il peut à nos sollicitations et à celles des familles. C’est nous qui devons juger les situations de soins en ayant l’obligation de lui transmettre nos observations pertinentes et ciblées. Notre collaboration avec le médecin est primordiale car elle permet, ensemble, d’évaluer et réajuster les traitements nécessaires au maintien ou à l’amélioration de l’état de santé des bénéficiaires de soins.

La famille et l’entourage du bénéficiaire de soins doivent faire partie intégrante du réseau qui l’entoure.


Webmaster éditoriale                        Sophie Lattion, présidente de l’association.


La relation médecin-patient âgé et l’âgisme

Publié le 27/05/2014 (mise à jour le 01/07/2018 à 12h10)

Relation médecin patient

L’importance des aspects relationnels dans la pratique médicale remonte à l’antiquité. Une revue de littérature récente montre qu’une meilleure communication dans la relation médecin-patient améliore le suivi et le résultat du traitement, la qualité de vie du patient, sa satisfaction et celle du médecin.

Différents types de modèles de relations médecin-patient ont été décrits au cours de ces années. Le plus ancien, «le modèle paternaliste» considère que le médecin sait tout, c’est un expert. Le patient ne sait rien, c’est un ignorant. Par respect du serment d’Hippocrate le médecin ne doit pas nuire le patient, ce dernier ne peut qu’acquiescer la thérapie du médecin, mais est libre de changer de médecin traitant.
Les exigences liées à l’information, au consentement éclairé du patient, ainsi qu’à la communication du dossier médical, ont fait évoluer cette relation d’une positio «paternaliste», trop inégalitaire, à une relation plus «autonome» du patient. Le modèle «délibératif ou autonome» établit un dialogue entre le médecin et le patient. Le consentement éclairé du patient est obligatoire. Le médecin ne peut pas prescrire un traitement ou un médicament au patient sans lui expliquer au préalable, le but et les conséquences possibles de cette prescription.
Le modèle délibératif présente des limites, car même éclairé, le malade n’est pas toujours apte à décider ensemble avec son médecin des traitements à entreprendre, car le savoir médical entre le deux n’est pas identique.Très souvent, le patient, soucieux avant tout de recouvrer sa santé, accepte de lui-même les décisions de son praticien. D’ailleurs, certains traitements sont administrés selon des protocoles déjà préétablis, ce qui réduirait la marge de manœuvre, tant au patient qu’au médecin.
Afin de faire face aux limites de deux précédents, un troisième modèle dit «modèle de la décision partagée » vient instaurer un partenariat souple. La compétence médicale du médecin et celle du patient dans la formulation de ses préférences sont mises ensemble au vu de son état sanitaire. Le partage constitue une voie fondamentale: partage des connaissances médicales du médecin, partage des préférences et du contexte psychosocial du patient, partage de la délibération devenue dialogue et enfin partage de la décision résultant de la réalisation d’un accord entre les deux parties. Il n’est plus question au médecin de proposer et au patient de consentir, ou au patient de proposer et au médecin d’obéir, ce qui poserait dans les deux cas un régime d’autorité.
Quelques caractéristiques de relation médecin malade
Cette relation est axée fondamentalement sur l’inégalité et l’asymétrie, puisque le besoin du patient le
rend passif et dépendant; sa souffrance le diminue. C’est une relation d’attente et d’espérance mutuelle : le malade attend la guérison ou le soulagement, le praticien la reconnaissance de son pouvoir de guérir ou de soulager. Le lieu d’échange est avant tout le corps, mais où le langage a sa place. C’est une relation de confiance et de respect de valeurs. La compassion joue un rôle prépondérant.

Relation médecin- personne âgée

Une personne âgée peut être définie comme celle dont l’âge est avancé et qui présente les signes physiologiques et sociaux de la vieillesse tels que décrit par la société. Très souvent, le départ en retraite représente cette entrée dans la catégorie sociale troisième âge.
Chez la plupart des personnes, le vieillissement se manifeste par une régression des capacités maximales liée à la diminution des réserves fonctionnelles, responsable d’un état de fragilité. Quelques personnes maintiennent, même à l’âge avancé, des capacités fonctionnelles optimales. Lorsqu’elle existe, la diminution des capacités s’amorce dès l’âge adulte et suit une chute progressive. La vieillesse n’est pas une maladie, mais représente un terrain propice pour le développement des maladies.
La relation « médecin personne âgée» doit tenir compte des caractéristiques physiologiques de cette tranche d’âge. Les personnes âgées ont le même droit de se décider sur leurs soins comme tout autre individu autonome. Cependant, elles peuvent présenter des problèmes de santé qui diminuent leur capacité de décider, dans ce cas le consentement éclairé doit être adapté. Il y a toujours une dimension éthique dans la démarche médicale en gériatrie.

L’âgisme dans la relation «médecin-personne âgée»

Selon Martine Lagacé, l’âgisme se manifeste par des croyances et des attitudes qui visent à exclure la personne sur la base de son âge.
Malgré le fait que la santé et les capacités varient énormément chez les personnes âgées, et que la majorité d’entre elles sont naturellement en bonne santé mentale et physique, les médecins supposent que celles-ci sont fragiles ou inaptes, physiquement ou mentalement. Plusieurs études semblent montrer que l’attitude des praticiens varie en fonction de l’âge des patients. Les médecins mettent peu de temps en consultation, donnent des informations moins détaillées, se montrent moins soutenants, moins égalitaires, moins ouverts aux diverses préoccupations psychosociales des patients âgés par rapport à celles des plus jeunes, alors que les problèmes de santé des aînés sont sou vent multiples et chroniques.
De cette façon, le médecin aura tendance à utiliser plus le modèle paternaliste dans sa relation avec l’ainé. Ce qui lui laissera toute la responsabilité de décider sur la prescription médicale . Quand bien même l’ainé peut se faire accompagner d’une tierce personne, l’inégalité des connaissances médicales fera que la décision du médecin aura tendance à dominer. La présence fréquente d’une troisième personne accompagnant la personne âgée lors de la consultation peut paraitre équivoque: d’une part, elle réconforte le patient, d’autre part, elle intervient de façon contradictoire dans cette relation . Cela peut conduire le médecin à adopter une attitude moins active, peu ouverte dans les échanges.
Selon Huber, différentes études montrent qu’à toutes les étapes de leur formation, les médecins partagent des perceptions négatives envers les personnes âgées. Ce qui peut avoir des répercussions sur leur comportement médical. Certains médecins hésitent de traiter les sujets âgés et préfèrent plus les jeunes. Les considérations âgistes diminuent la compassion et l’empathie du médecin envers l’ainé.
Citons le cas de dépression, peu évaluée chez l’ainée suite à la domination de la composante somatique (insomnie, fatigue, perte d’appétit, etc.), de son association avec des troubles cognitifs ou encore de croyances âgistes concernant le caractère banal d’une certaine tristesse avec l’âge. Par ailleurs, certains troubles psychiatriques peuvent être attribués sans raison aux personnes âgées, sans que soient recherchées d’autres causes potentielles (organiques, iatrogènes ou environnementales). Notons également que du point de vue psychologique, les personnes âgées continuent à être considérées comme rigides, insatisfaites, mentalement détériorées, limitées dans leurs aptitudes de changement, etc. et sont donc taxées comme des mauvaises candidates pour une psychothérapie .Des tels stéréotypes âgistes conduisent encore les médecins à utiliser les psychotropes pour soigner leurs souffrances psychiques , parfois au détriment des bénéfices réels d’un soutien psychothérapeutique .
En guise de conclusion, retenons que la relation médecin malade constitue une pierre angulaire qui améliore le suivi et le résultat du traitement. Pour donner un consentement éclairé, le médecin sans se dédouaner de son rôle devra expliquer au patient sa maladie en adaptant son langage à celui du patient. Le savoir médical du médecin doit être utilisé rationnellement afin de trouver une solution appropriée aux maux du patient. Le modèle délibératif et le modèle à décision partagées sont à privilégier pour aboutir aux meilleurs résultats cliniques possibles. L’âgisme déforme la relation médecin personne âgée.
Dans un contexte de vieillissement de la population actuelle comme future, il est important de repenser les représentations, les croyances et les attitudes partagées par les futurs médecins face aux personnes aînées. La formation des futurs médecins doit tenir compte de ces aspects afin d’armer suffisamment ceux-ci à faire face à l’âgisme.

Auteur

Observatoire Vieillissement et Société
O.V.S.