Qui suis-je devenue?
Publié le 07/05/2014 à 21h30 (mise à jour le 01/07/2018 à 20h03)
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Vignette
Cette maquette représente une bénéficiaire de soins (Bds) qui a perdu son identité corporelle, l’image de soi et au final sa dignité. Son visage dans le miroir ne correspond plus au portrait en face d’elle. Portrait qui était sien. L’histoire de cette boîte est réelle.
C’est l’histoire d’une Bds à qui l’ont ne fait plus de couleur aux cheveux car la coiffeuse a du mal à lui pencher la tête en arrière ou à lui faire comprendre le but de ces gestes. Alors on abandonne, par facilité. On ne recherche pas de solutions au problème. Tant pis, elle passera du brun/noir au blanc!
C’est l’histoire d’une boîte à bijoux rangée au fond de l’armoire…D’un parfum passé de date… D’un rouge à lèvre poussiéreux et d’un vernis à ongle sec.
C’est l’histoire de beaux vêtements rangés dans une valise lors d’un changement de chambre et jamais réinstallés sur des cintres…
C’est l’histoire d’une Bds dépendante, transférée du lit au fauteuil roulant sans passer par le miroir de la salle de bain…
Mais surtout l’histoire de plusieurs Bds qui, par hasard, des mois voir année après, se revoient dans un miroir et ont un choc. Je revois le visage horrifié de ces personnes, totalement paniquées. Et puis, s’il y a une prise de conscience, des changements peuvent s’opérer et on réalise que rien n’est impossible! Une personne démente peut très bien choisir entre deux vêtements ou deux bijoux. Oui, c’est possible de faire une couleur aux cheveux de n’importe quel Bds! Il y a l’art et la manière... Mais le mal est fait. Il faut empêcher que cela se reproduise.
Chaque jour, je me pose cette question
Est- ce que j’ai favorisé l’indépendance et la prise de décisions du Bds?
Est-ce que j’ai pensé à ces trésors affectifs qui alimentent l’image corporelle et l’estime de soi?
Est-ce que j’ai favorisé le choix des vêtements? Celui-ci ou celui-ci?
Des minutes qui peuvent sembler longues mais des minutes qui renforcent l’estime de soi et peuvent diminuer les réactions défensives.
Webmestre éditorial Sophie Lattion, présidente de l’association. Tous droits réservés ©
Le concept de soi
Publié le 07/05/2014 à 21h30 (mise à jour le 01/07/2018 à 14h17)
Le concept de soi est la façon dont une personne se sent, se voit ou pense être. Il évolue et change constamment, de la naissance à la mort; il est influencé par l’interaction de la personne avec son milieu et son entourage ainsi que par la façon dont les autres la perçoivent. Ce concept inclue les sentiments, les attitudes et les valeurs ; il influe sur les réactions en toutes circonstances. Il englobe la façon dont on se fait une représentation mentale de soi-même, de sa valeur, de ses capacités, de son pouvoir de séduction et de sa capacité à se faire aimer. Il comprend l’image corporelle, l’idéal du moi, l’estime de soi, l’exercice de son rôle et l’identité personnelle.
L’Image corporelle
Bob Price, directeur de l’enseignement par correspondance au Royal College à Londres (1998), définit l’image corporelle en trois composantes : le corps réel, le corps idéal et l’apparence.
Le corps réel
C’est le corps tel qu’il existe, tributaire de l’hérédité et transformé par l’usure du temps et les agressions du milieu. C’est en quelque sorte une composante de l’environnement. Le corps réel change à la fois parce qu’il vieillit d’une part, et parce qu’on l’utilise en permanence d’autre part. De même, les traumatismes, le cancer, l’infection et la malnutrition peuvent changer de manière radicale le corps réel. Un regard réaliste sur les possibilités et les limites du corps réel constitue souvent l’élément déclenchant d’une réflexion autour de ce qui menace l’image corporelle et d’une prise de conscience de l’existence d’une perturbation de l’image corporelle.
Quand le corps réel change, il s’écoule souvent un certain laps de temps avant que l’image corporelle change, elle aussi. Durant ce laps de temps, la personne peut refuser le diagnostic, l’enseignement et le traitement prescrit.
Le corps idéal
C’est l’image mentale du corps rêvé et des prouesses qu’il devrait accomplir. La conception du corps idéal est profondément influencée par les normes socioculturelles, par la publicité et par les diverses modes concernant la forme physique et la santé.
L’image mentale du corps idéal peut être perturbée par une altération du corps réel et toute perturbation du corps idéal peut affecter directement l’équilibre mental et physique de la personne.
L’apparence
Le corps réel s’harmonise rarement avec l’image qu’on se fait du corps idéal et c’est pour essayer de faire correspondre le rêve à la réalité que l’on se présente d’une certaine façon aux yeux des autres. L’apparence est, littéralement, la façon dont on présente son corps au monde extérieur : la façon de s’habiller, de se coiffer et de soigner sa présentation, de marcher, de parler, de bouger ou même d’utiliser du matériel d’appoint comme une canne ou un appareil auditif. La mode (qui touche principalement le corps idéal) peut changer radicalement l’apparence d’une personne. De même, la paralysie ou la perte d’un membre (qui touche le corps réel) peut aussi changer radicalement l’apparence.
Le schéma corporel
Le schéma corporel est souvent confondu avec l’image corporelle. Tous deux peuvent être altérés indépendamment l’un de l’autre.
Selon Françoise Dolto, psychanalyste, le schéma corporel « spécifie l’individu en tant que représentant de l’espèce, il est le même pour tous les individus. Le schéma corporel se structure par l’apprentissage et l’expérience, il est indépendant du langage ». Il est une réalité de fait, constitué à partir de perceptions. Le schéma corporel est en partie inconscient mais aussi pré-conscient et conscient alors que l’image du corps est éminemment inconsciente.
Interventions de soins
Il s’agit de proposer un soin qui ouvre un espace d’expression, en considérant la personne dans sa globalité (prendre soin du corps tout en se préoccupant du vécu de la personne).
Cette approche est un processus où le soignant et le patient vont vivre plusieurs étapes :
Établir une relation de confiance
par un moment de présence authentique, où le soignant est à l’écoute de l’expérience vécue par le patient.
Explorer et s’intéresser au vécu de la personne:
- Sa façon de vivre la maladie, la chirurgie, le traitement, la rééducation, («Tous ces tuyaux dans mon corps, c’est comme si on me violait »)
- Son expérience
- Ses sentiments et émotions concernant son apparence, son style de vie
- Ses représentations ses objectifs et ses projets de vie
- Les sensations corporelles du moment dans l’ensemble du corps, de la tête aux pieds (« c’est bizarre de ressentir ce liquide chaud au travers de la poche sur mon ventre »)
- La place du corps dans l’histoire actuelle (« ce qui est important pour moi c’est d’être en vie même avec mon pied en moins, car j’aurais pu y rester »)
- Les évènements ayant pu s’inscrire dans le corps : les maladies infantiles ou de l’âge adulte, les signes annonciateurs de la maladie, les accidents, allergies, interventions chirurgicales, les agressions...
- L’activité physique et sportive actuelle et antérieure
- Les parties du corps les plus investies et les moins investies (« je n’ai jamais aimé mes jambes, par contre je suis fière de mes mains »)
- La manière et les mots utilisés pour parler du corps
- Les sentiments et émotions qui se dégagent : respect, honte, indifférence, rejet, attentions, soins («J’ai honte de montrer mes mains, j’ai l’impression que cela dégoûte les gens »)
- L'impact sur l’identité de la personne («Je suis professeur, mais mes enfants ne m’ont connu que malade »)
Informer la personne et ses proches tout au long du séjour sur:
- Le diagnostic, les traitements, les effets indésirables (par exemple chute des cheveux après un traitement de chimiothérapie, repousse des cheveux...) et les possibilités palliatives à cet évènement (perruque, foulard, chapeau, ...)
- Le processus de soins et de réadaptation
Élaborer un objectif de soins avec la personne,
afin de l’aider à s’adapter au changement dans l’image de son corps, pouvant lui permettre d’exercer une certaine autonomie
Aider à construire de nouvelles compétences:
- Gérer sa maladie, perdre son autonomie, subir de nombreux traitements sont des facteurs qui mobilisent une grande partie des ressources de la personne. Cette gestion nécessite du temps, en fonction des prises de médicaments, des soins plus ou moins longs à organiser sur une semaine...et aussi de l’énergie car souvent la maladie est fatigante et douloureuse.
- Face aux répercussions de l’atteinte corporelle, les patients doivent donc changer leurs habitudes et leurs comportements. Dans la plupart des cas, la personne soignée chemine vers l’idée qu’elle aura à prodiguer des soins à elle-même, puis intègre des nouvelles notions jusqu’à apprendre et maîtriser de nouveaux gestes : fixer sa prothèse de jambe, faire les irrigations, gérer son emploi du temps pour les patients colostomisés, contrôler les effets secondaires des traitements, ...
Le parcours vers une plus grande autonomie passe par l’apprentissage des soins. Ce processus peut aider le patient à mieux intégrer sa nouvelle image corporelle puis, peut-être, à se l’approprier progressivement.
Construire des compétences adaptées à leurs possibilités et à leurs motivations, peut améliorer la perception qu’ont les patients d’eux-mêmes.
Plusieurs actions constituent cette démarche d’enseignement :
- Recueillir les perceptions que la personne a d’elle-même
- L’aider à regarder et à toucher la partie atteinte
- L’aider à identifier et mobiliser ses ressources personnelles et externes
- Évaluer avec elle ses capacités, mettre en valeur les aptitudes existantes et les coordonner avec sa réalité
- Créer ensemble des objectifs d’apprentissage
- Lui proposer de faire le point sur ses acquisitions
- Valoriser la personne, l’aider à renforcer l’estime qu’elle a d’elle-même
- Fixer de nouveaux objectifs
- Assurer la continuité de l’apprentissage en trouvant des relais
Image consultée le 28.05.2014 sur http://kawaii-citations
Source internet consultée le 22.05.2014 sur http://soins.hug-ge.ch